Ambiance

"Lors de ma première naissance, je n'étais pas là. Mon corps est venu au monde le 26 juillet 1937 à Bordeaux. On me l'a dit. Je suis bien obligé d'y croire puisque je n'en ai aucun souvenir. Ma seconde naissance, elle, est en pleine mémoire. Une nuit, j'ai été arrêté par des hommes armés qui entouraient mon lit. Ils venaient me chercher pour me mettre à mort. Mon histoire est née cette nuit-là". Boris Cyrulnik.

Ils sont morts cent dix fois
Pour que dalle et pourquoi ?
Avec l'amour au poing
Sur la table ou sur rien

Avec l'air entêté
Qui fait le sang versé
Ils ont frappé si fort
Qu'ils peuv'nt frapper encor

Comment un homme peut-il accepter d'aller au combat ?
Et quand il sent au fond de lui qu'il ne reviendra pas.
L'homme est-il un animal ?
Comme à cette époque le mal est déjà caporal.

« Je veux pas la guerre. Qu’ils aillent se faire foutre. Pour des frontières, pour des nationalités. Jamais dans ma vie personne ne m’avais parlé de nationalité. Parce que je le répète tout le temps, le problème il est pas entre les gens, il y a pas de problème entre les musulmans et les serbes, il y a pas de problème entre les serbes et les croates, parce qu’ils sont tous bosniaques. Le problème il est chez les hommes politiques. Les hommes qui veulent le pouvoir, c’est ça mon problème. »

Au mois de mai, j’ai un ami qui a été tué dans un char à côté du mien. Nous étions très liés. Le jour de sa mort nous avions passé près de 3 heures ensemble. Je lui ai donné un paquet de cigarette en lui disant « tu peux pas rester sans cigarettes ! ». J’étais pour lui comme un père parce que j’avais 28 ans et il n’en avait que 22.

Sa mère était à côté du cercueil, elle pleurait. Elle m’a pris dans ses bras, elle m’a demandé : « pourquoi tu n’as pas sauvé mon fils ? ». Je me rappellerais toujours de ce moment-là. Ça m’étouffe, j’ai envie de pleurer. Non j’en ai marre je ne veux plus parler. Je veux plus parler. J’ai besoin de calme et de silence. Je veux être seul, je veux plus voir personne. Ceux qui étaient les plus proches de moi sont plus là. Avant la guerre j’étais un homme, maintenant je suis plus rien. J’étais un homme, maintenant je suis détruit.

Derrière cet immeuble, juste à 200 mètres d'ici, on a l'entité qu'on appel République Serbe en Bosnie-Herzégovine. C'est absurde parce qu'on parle de territoire ethniquement nettoyé.